OKéANOS

Episode 16

PACO - IRIS / Jaroslav GROMOVSKY

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5. Initiations.

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BANDE-SON

Le « Révolutionnariste » PACO avait laissé allumé son murécran sur la chaîne WWInfo, où l’on faisait état des nombreux tremblements de terre d’amplitudes variées sur toutes les côtes du Pacifique Sud. La CITE DES ANGES faisait la mire de l’actualité. C’était certainement le cataclysme le plus spectaculaire de ce début de Siècle, et annonçait un Millénaire réjouissant en mutations géopolitiques. La presqu’île que constituait la Cité s’était totalement détachée du continent amérikkkain ; une partie avait été immergée en quelques dizaines de minutes par les effets conjugués des secousses telluriques et d’un raz-de-marée. Il était impossible pour les autorités de faire état d’un nombre de victimes. Et c’était un peu la même chose pour d’autres régions de la côte amérikkkaine du Pacifique. Un désastre.

Les informations constituaient pour IRIS le bruit de fond symbolique de la quête de son identité. PACO lui avait confié un dictaphone pour qu’elle y enregistre tout ce qu’elle y voulait. Les choses qu’elle savait, les quelques souvenirs qu’elle avait l’air de réaccumuler. Elle s’isolait dans la petite chambre d’amis, laissait la porte entrouverte, parlait et se réécoutait parler.

« Je me souviens d’être moi, femme et jeune. Je dois toujours faire un effort pour me rappeler mon propre visage, mais à présent j’y arrive un peu mieux. Ce visage, c’est celui qui s’appelle IRIS. Pour le moment, c’est moi. IRIS, c’est le nom que m’a donnée PACO. C’est la première personne à qui je me souvienne avoir parlé. Nous sommes devant un gigantesque écran et il rit. Les images sont floues. Ce matin, au réveil, j’ai cru me rappeler d’un autre visage, celui d’un homme plus âgé qui gesticulait et qui pleurait. Dans un jardin. C’est t... »

IRIS venait d’arrêter l’appareil. PACO, qui s’était approché de la petite pièce pour informer IRIS des tremblements de terre, l’entendit mettre en marche la fonction REC enregistreuse. Elle parla.

« Les images sont floues. Ce matin, au réveil, j’ai cru me rappeler d’un autre visage, celui d’un homme plus âgé qui gesticulait et qui pleurait. Dans un jardin. C’est tout. J’ai toujours les mêmes problèmes pour distinguer mes rêves d’éventuels souvenirs, comme j’ai toujours cette douloureuse perception du temps. Le rêve que j’ai fait cette nuit m’a semblé être prémonitoire, mais au réveil, je l’ai confondu avec un souvenir. Je ne distingue plus le passé de l’avenir, tout en ayant la certitude au fond de moi que je n’ai pas toujours été comme ça. »

IRIS s’interrompit à nouveau pour se mettre à pleurer lentement, en silence. PACO se sentit indiscret, et allait se résoudre à frapper à la porte, quand une pensée l’arrêta.

Le murécran déversait ses informations continues sur les tremblements de terre. Outre la CITE DES ANGES et ses 340 000 victimes déjà recensées, on comptait: SANTIANO DEL CHILI: 200.000 morts et disparus. LIMHA: 86.970 victimes. GUAJALALA: 56.000. TAHITI: 2.500. ILE DE PAQUES: 750 victimes. Proportionnellement, c’était le nombre le plus meurtrier de la liste.

 

Une fois le ronron des reportages 24/24 bien rôdé à grand renfort de chaînes satellites spécialisées, l’Observatoire Mondial de Météorologie rapporta que l’origine présumée du séisme avait eut lieu en plein Pacifique, provoquant en haute mer une violente tempête. Parmi les victimes célèbres du désastre, on pouvait compter le Député Adrian BETELA, porté disparu en mer en compagnie de sa femme, de l’avocat Johann PANIS et du Vétéran Spot MANDLEBROT en villégiature.

« Z’ont qu’à crever! Ca nous fera une belle brochette! » lâcha le prêcheur Jaroslav GROMOVSKY pour lui-même. Dans le réfectoire de la maison d’arrêts de BAIRLINE, on n’appréciait guère son humour. Après son arrestation et les prises de dépositions, on l’avait emmené là, en attente de son jugement qui pouvait très bien être rendu sans lui. « Y a un putain de MANDLEBROT en cavale quand il a toltchoké un champion de boxe devant les mirettes d’un paqson d’témoins, et on va m’niquer pour une putain de Goldish allumée dans un square. C’est pas Dieu possible, on va pas s’en sortir!...

- Tu vas pas t’en sortir si tu fermes pas ta sale gueule, taré! »

Non, on appréciait ni son humour, ni ses opinions. Fini le temps des retrouvailles au poulailler une nuit de rapine ou de grosse biture. La maison d’arrêts, c’était « on arrête tout et on attend ». Ca pouvait durer. Pour calmer les esprits, et depuis les réformes BETELA de la Justice, on proposait aux détenus provisoires des « programmes de réinsertion dans la vie active » (comme grouillot de base, faut pas rêver ! T’as d’jà vu un mec faire de la taule et devenir ministre ? Hein ? Plutôt le contraire, non ?). En fait, pour Jaja qui comprenait tout mieux que quiconque, l’objectif était simple et clair : cataloguer les différents types de déviances sociales, faire parler de tout et de rien, étudier les comportements par des « jeux de rôles » censés réapprendre à trouver du travail, et toujours : repérer les perles rares, les vrais tueurs, les professionnels qui accepteraient n’importe quel boulot pourvu d’être payés et protégés.

Par exemple, le vigile de faction au réfectoire était Bétéliste, c’était presque tatoué sur sa sale gueule. Il avait monté le son du murécran, qui diffusait un portrait du Député BETELA.

 

« Le Député BETELA est connu pour avoir su moderniser la vie politique, qui, selon ses propos, « se doit de (re)devenir la faculté à gérer les tendances éthiques et morales de la vie économique, les orientations sociales étant l’affaire du patronat. » C’est sur ces directions qu’a été créée la « Ligne Aticale » à la suite d’un sommet de réflexion à CHORAZIN, ville natale de BETELA, où se sont réunis il y a maintenant cinq ans des politiciens de tous bords pour trancher la question de l’obsolescence ou non de la classe politique mondiale. Si BETELA a su insuffler une motivation de renouveau et de redéfinition des enjeux politiques, en s’appuyant sur des spéculations alors hardies, celles-ci n’ont pas tardé à se vérifier - ce qui a encore ajouté au prestige du Député européen dont on est toujours sans nouvelles. »

 

PACO s’avoua qu’IRIS le troublait toujours autant ; ses camarades de la cause l’avaient mis en garde. TEUTEUCH n’avait trouvé aucune trace de la jeune fille amnésique dans les fichiers épars des cellules Révolutionnaristes du Monde, et avait même demandé un des cheveux de la fille pour poursuivre son identification, non sans avoir tenté de persuader PACO qu’elle était une espionne, infiltrée par on ne sait quelle autre faction rivale. Pour PACO, c’était une chose impossible ; il connaissait les techniques d’infiltrations pour les pratiquer lui-même, et jugeait inconcevable qu’elle joua la comédie. Tout au pire était-elle victime d’une faction adverse qui la manipulait, mais PACO pensait pouvoir déjouer ce Cheval Troyen et le retourner au profit de la Cause Révolutionnariste.

Mais il y avait un mystère encore plus troublant que celui du passé d’IRIS. Et comme il venait de l’entendre évoquer la distorsion de sa perception du temps, il réalisa ce qui l’avait inconsciemment chiffonné depuis sa rencontre avec elle. Il se rappelait bien, dans son cabinet d’écrivain public à TANGER, avoir entendu l’imprimante fonctionner avant qu’elle ne tape quoi que ce soit. Et il n’avait trouvé aucune trace de document nulle part. A l’instant, elle venait d’enregistrer ce qu’elle venait déjà d’entendre sur le dictaphone. Et ses souvenirs lui laissaient l’impression de rêves prémonitoires. PACO entrevit une solution logique, mais absurde et irrationnelle. A ce moment, IRIS détourna les yeux vers la porte et vit l’ombre de PACO. « Entre! dit-elle. Je voulais te montrer quelque chose. » PACO se sentit un peu confus en pénétrant dans la petite chambre. Il tenta de se justifier. « J’allais entrer quand je t’ai entendue recorder ta voix. Il y a eu des tremblements de terre un peu partout sur les côtes du Pacifique. On parle de millions de morts. Je voulais que tu le saches, je ne sais pas pourquoi...

- Merci PACO. Je me sens ridicule parfois, centrée que je suis sur moi-même, quand tant de gens souffrent. Mais les tremblements de terre font partie du quotidien, non ?

- Non, IRIS. Que...

- J’ai l’impression d’avoir toujours connu des séismes, des raz-de-marée, des volcans en éruption. N’est-ce pas ainsi que le Monde a toujours été ? Des maladies ? Des guerres ? Des famines ? Les morts ?

- Oui IRIS. Il y a quelque chose de pourri au Royaume de DANVEGE, comme disait TOWSON. Et puis, je voulais te dire aussi, enfin... il me semble que j’ai entrevu une explication à ton amnésie. C’est... » Un appel intercom’ l’interrompit. La sonnerie codée TEUTEUCH retentissait depuis le salon et couvrait même le bruit des informations. PACO décrocha. TEUTEUCH avait le visage tendu des révélations surprenantes. « PACO ? Tu es seul ?

- IRIS est à côté. Je viens de brancher la bulle d’isolation, tu peux parler.

- C’est à propos d’elle, en fait, comme tu t’en doutes. J’ai réussi à obtenir le code génétique de la fille à partir du cheveu que je t’avais demandé. Mon pote du Labo de SUJIEU me l’a transmis avec les codes d’accès d’un bon paquet de banques d’identifications génétiques. Je viens de terminer, et accroche toi bien : IRIS comme tu dis n’existe pas. Il n’y a aucune trace de son code nulle part, même légèrement dérivé. Pas de famille, pas de passé, pas d’identité. Elle passerait même pas à un contrôle de routine. Et c’est même pas vraiment un code génétique humain !.. C’est une menace pour nous tous, PACO. Tu dois vraiment découvrir qui nous l’a envoyée ou t’en débarrasser.

- TEUTEUCH, tu déc...

- J’suis désolé d’avoir à te dire ça vu qu’t’es un peu le chef, ici, mais sache qu’on en a parlé avec les camarades, et qu’on est tous d’accord. J’veux bien te donner des pistes pour enquêter, mais vu qu’je suis débordé par les analyses des infos d’en ce moment ; au fait, t’as vu pour BETELA ? Ouais, enfin, en gros démerde-toi, c’est tout ce que je peux te conseiller. Mais tant qu’t’auras pas éclairci cette embrouille, tu feras un peu office de paria à la cellule... Alors active-toi. J’t’envoie les pistes à suivre. Tiens-moi au courant ! A plus, PACO ! »

PACO resta un instant étourdi devant l’écran noir. Il débrancha la bulle d’isolation, et entendit la voix d’IRIS qui provenait de la chambre. Elle ne parlait pas, elle psalmodiait.

 

« De la fuite plutôt que la meilleure réalité du vent à changer,

donnant la vie plutôt qu’en avoir pas ;

je ne m’en contente pas de nuit,

mais je suis tout comme la rivière:

un pur amour. »

Comme PACO entrait à nouveau dans la pièce, précipitamment, il vit IRIS allongée sur le lit, le corps rigide, tendu, les yeux révulsés. Son poing droit était serré sur une petite liasse de feuilles recouvertes de son écriture à elle. Sa bouche s’ouvrait en des claquements secs, et les sons de sa voix ne semblaient pas correspondre aux mouvements chaotiques de sa mâchoire. Stupéfait, PACO vit la dernière possibilité de s’expliquer ce phénomène vocal en découvrant le dictaphone brisé le long du mur d’en face.

« La chaîne et le blanc,

de tous ceux-là, je comprends

d’un zéro contaminant,

n’enserrent

les cités de mythes ;

je ne peux dire.

Pour que cette force extasiante,

pour croire,

je cherche dans l’Océan,

humide condition humaine,

parfois au Diable.

En ces moments, je serai le nid de vrai. »

«IRIS, pour l’amour de la Cause, réveille-toi !» PACO tentait de maîtriser ses mouvements saccadés et de l’empêcher d’avaler sa langue. Le visage à quelques centimètres de celui de la jeune femme, il eut l’étrange impression qu’elle aspirait l’air plutôt que de parler en expirant. « Réveille-toi ! »

« Se dissoudre ?

Pourquoi ?

Je hante la goutte d’amour

plutôt que la source, la force,

plutôt que le mal

- tout comme de l’amour. »

Elle eut une violente convulsion qui arqua son corps en entier selon un angle quasi impossible. PACO sentait son esprit vaciller comme lorsqu’enfant il avait regardé « L’Exorcisme » à la télévision. Puis le corps retomba lourdement, comme vidé de toute tension. IRIS semblait s’être soudainement abandonnée au sommeil, comme dans un coma.

Dans le calme soudain, le murécran prit la place de toute réalité. Après les annonces publicitaires, on annonçait qu’un canot de sauvetage avait été retrouvé au large de l’Ile de Pâques avec à son bord la femme du Député, Jahéva BETELA. Selon ses dires, il y aurait une forte probabilité de retrouver vivant son mari dans un canot semblable. Elle désirait partir sans prendre de repos avec une équipe de recherches de la Marine Chilienne.

 

« Vous parlez d’une devotchka ! C’t’un vrai dragon! Elle lâcherait pas son mari deux minutes ! Elle peut pas le laisser couler en paix çui là ! ? » On avait demandé à voir le détenu Jaroslav GROMOVSKY en particulier. Un maton était venu le chercher au réfectoire. Dans les couloirs de la maison d’arrêts, on entendait partout les crachotements des transistors, et les murécrans étaient tous allumés. L’Odyssée de Jahéva BETELA à la recherche de son mari perdu en mer, quand toute une région du Globe était sinistrée, avait quelque chose d’exaltant, porteur d’espoirs. « Tu crois quand même pas qui vont le r’trouver, toi ? » avait lâché Jaja au jeune maton qui le tenait par les poignets. « Ferme-la, j’essaie d’écouter. J’étais peinard au mess et on m’demande d’aller t’trouver. J’sais pas c’qu’i’ t’veulent, mais tu les intéresses. Plus que La Cité des Anges et le Député BETELA en tous les cas.

- Ouais, les Anges, j’connais bien, mon pote ! T’as pas une cibiche ?

- Tu vas la taire, ta gueule ? »

Jaroslav fut emmené dans une autre aile du bâtiment, qu’il ne connaissait pas. Les couloirs étaient différents, blancs, propres. Ca ressemblait plus à un asile. Il fut enfermé dans une petite cellule capitonnée, éclairée par une faible ampoule jaune sale piquée de cadavres de moucherons. Cinq minutes plus tard, des infirmiers lui ôtèrent sa blouse de taulard et lui firent une piqûre. Comme il tenta de se débattre pour gagner du temps, il reçut quelques décharges électriques qui le sonnèrent. L’infirmier qui montait la garde devant la porte écoutait son transistor à fond. Dans le brouillard, Jaroslav perçut les informations comme s’il s’agissait des voix d’Anges. Mais il eut l’impression d’une toute autre espèce de Daimòn, aux mots pervers et retors, manipulateurs et malsains.

« Un Nouveau Monde ! L’équipe chilienne menée par Madame BETELA a retrouvé le Député échoué sur une île volcanique fraîchement émergée des eaux. C’est sans doute une éruption sous-marine d’une ampleur peu commune qui a provoqué ces nombreux tremblements de terre et cette violente tempête dans le Pacifique Sud. Cette terre nouvelle semble couvrir la superficie d’un petit pays comme le LICHTENBURG. Selon les textes de lois de la Commission du Monde Libre, l’île ne se situe dans aucune zone territoriale et appartient donc au premier qui en aurait foulé le sol, à savoir le Député BETELA. On nous confirme à la rédaction la survie du Député et la disparition en mer de Maître Johann PANIS. Toujours aucune nouvelle du Vétéran Spot MANDLEBROT. Mais tandis qu’une équipe d’écranvision nous transmet en direct les premières images de l’île.... »

 

IRIS s’était éveillée quelques heures plus tard. Elle ne sembla pas reconnaître PACO tout de suite, puis dit son prénom. « PACO. Tu es PACO et tu m’as appelée IRIS. » C’était là son rituel au réveil. Devant l’affolement résiduel du révolutionnariste banni, elle resta interdite. Elle ne se rappelait de rien des heures qui avaient précédées, de sa crise d’épilepsie ou du dictaphone brisé, mais trouvait que ce serait une bonne idée d’avoir un dictaphone. Elle allait bien. PACO n’osa plus rien tenter d’expliquer. Il l’avait veillée, et avait pris maintenant place devant son murécran.

« ...C’est bien le Député BETELA qui vient d’être sauvé ; l’hélico nous montre à présent la plage recouverte d’algues où s’est échoué son canot de sauvetage... On imagine quelle émotion sa femme et lui peuvent ressentir... Des sondages radar sont toujours effectués pour retrouver une trace ne serait ce que de l’épave du yacht... On ignore s’il a coulé ou non... »

« Tout à l’heure, IRIS, quand je t’ai annoncé qu’il y avait eu des tremblements de terre, tu m’as dit que ça avait toujours été comme ça, et que ça te faisait bizarre de ne penser qu’à toi quand on comptait des millions de morts en quelques minutes. Moi aussi, ça me fait bizarre. Je trouve ça un peu gros, cette histoire de sauvetage de Député. Ca ressemble trop à une parabole. J’ai pas l’impression que c’est vrai. Je crois comprendre ce que tu ressens quand on te raconte le passé. T’as pas le choix d’y croire ou non, vu que c’est tout c’qu’on te donne à savoir. Mais si je comprends, ça me donne pas la force de t’aider comme il faudrait. TEUTEUCH m’a donné quelques adresses de psychologues qu’il connaît. Ils ne nous demanderont pas de papiers. Qu’est-ce que tu en dis ? Tu m’écoutes, IRIS ? »

La jeune femme avait les yeux rivés sur les images du murécran. On annonçait que Spot MANDLEBROT avait été retrouvé non loin de l’île dans un état très critique, mais vivant. Il allait être rapatrié avec le Député et sa femme en Afrique du Sud, à GERMINSTON, où des cyberchirurgiens tenteraient les opérations de dernières chances. C’était aussi un challenge pour eux de reconstituer l’intégrité d’un être fracturé de toutes parts. On n’avait jamais encore été jusque-là en cybernétique. De son côté, Sir BLANDERDASH, président des industries pharmaceutiques G-II FARBEN et éminent représentant de la Ligne Aticale, lançait un appel à tous les entrepreneurs et êtres humains de bonne volonté, pour contribuer à faire de cette île une Terre Nouvelle digne des plus grands progrès de ces dernières années, et un hommage aux victimes et disparus du séisme planétaire. BETELA avait toujours cru dur comme fer pouvoir bâtir un nouveau mode de civilisation vraiment novateur.

Une équipe d’écranvision filmait une file d’attente spontanée à GERMINSTON. C’étaient tous des ouvriers, des mineurs, des bâtisseurs. IRIS fixait les images avec une intensité que PACO ne lui connaissait pas encore.

« Tu regardes les pauvres maudits, hein ! Ce sont eux qui ont encore la condition la plus pitoyable ! L’école communale n’existe même pas là-bas. Ils vivent comme des bêtes dans des ghettos grouillants et sordides, ils pourrissent dans la misère et la dégradation. Ils sont esclaves du travail ; le choix même de leur travail leur est dénié. Tu sais qu’on leur refuse le droit de changer de résidence, et celui de porter ou de posséder des armes ? Des serfs de la machine et du labeur ! On opère des levées dans les ghettos, et ils sont transportés par dizaines à pied d’œuvre, juste quand le besoin d’eux se fait ressentir. De véritables armées de serfs ! En vérité, c’est bien là qu’est le danger pour nos Oligarques grenus. Mais c’est eux-mêmes qui l’ont créé et l’entretiennent. C’est eux qui empêchent la disparition du singe et du tigre dans l’Homme...

- Nous devons y aller, PACO. Nous devons y aller...

- Comment cela, IRIS ? Tu veux aller à GERMINSTON ?

- Non, sur l’île. Nous devons y aller, tu dois m’y emmener PACO. C’est là que je suis née... »

 

L’ombre d’un espoir qu’elle eut retrouvé la mémoire fit bondir le cœur de PACO. Mais aussitôt, il fut terrassé par la peur. IRIS disait être née sur une île qui n’existait presque pas. Il repensa aux injonctions de TEUTEUCH. « Tu devras t’en débarrasser. Elle n’existe pas. Elle n’a pas de famille, elle n’a pas de passé. Elle n’est même pas humaine...» Et elle semble vivre dans un temps à rebours, pensa PACO. Elle parle à l’envers et voit le passé comme une prémonition.

IRIS le fixait, de sa façon particulière. Elle semblait tout pouvoir lire du dilemme intérieur de PACO. Elle attendait une réponse. « Soit, IRIS. Nous irons sur cette île. Mais tu dois me promettre de me laisser les moyens de t’aider, et de trouver des réponses à l’énigme de ton passé. TEUTEUCH prétend que tu ne passerais pas le moindre barrage de contrôle d’identité. Moi je pense au contraire que les papiers que je t’ai fait faire à TANGER suffiront. Mais si on t’attrape et qu’on te sépare de moi, tu ne dois jamais mentionner la Cause, ni le moindre mot de passe. C’est très important. C’est compris ?

- Quel mot de passe, PACO ?

- « Trois ou quatre, peu importe le nombre de racines au pouvoir », tu ne t’en rappelles pas ?

- Je l’ignorais. »

PACO ne pouvait plus être certain de rien, du jeu qu’elle jouait si jeu il y avait. Mais puisqu’il n’avait pas le choix, il promit d’entreprendre les jours suivants les démarches nécessaires à leur intégration dans les colonnes de volontaires pour l’île nouvelle.


Un autre type de colonne se formait en parallèle. Jaroslav GROMOVSKY subit plusieurs séances d’une méthode appelée « Ludovico » avant d’y prendre place. Il avait à présent le crâne et le menton rasés, il se tenait droit, il ne tergiversait plus et avait tout oublié des Anges. Sur son bras droit, son numéro d’immatriculation avait été tatoué sous forme de codbar’.

PACO / IRIS / Jaroslav GROMOVSKY

Leurs EPISODIES

Première partie : Racines au pouvoir

2. Visitations

Episode 02

Episode 03

Episode 04

Episode 05

Deuxième partie : Le Volcan dans l'Océan

5.Initiations

Episode 16

6. Manipulations

Episode 26

 

Prochain épisode :

Episode 17 : 5. Initiations / Hyt KOULADYB

La suite directe de la narration

Episode 26 : 6.Manipulations / Paco - Iris

 

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